samedi 20 avril 2013

Claudio le rital - Et toi, pourquoi t'es parti ? #1


J'ai connu Claudio à mon boulot. Il m'a un peu formé au boulot de réceptionniste et m'a filé les petits réflexes et autres attitudes à avoir quand on est réceptionniste dans l’hôtellerie. 
J'ai été assez touchée par son professionnalisme (le mec en costume cravate impeccable à toute heure..enfin quand il travaille bien sur!), et puis y'a pas à tortiller, il a la classe, attenzione! 


J'ai pas encore eu l'honneur de goûter à ses pastas mais malgré cet affront, j'ai eu envie de le questionner. Nos discussions sur l'Europe et nos pays respectifs m'ont donné envie de creuser un peu le personnage.

Cette "interview", réalisée un dimanche après-midi au Story Bridge Hotel de Brisbane  pourrait peut-être représenter la 1ère d'une série. Discuter avec les personnes que je rencontre des origines de leur départ, de leur vision de l'avenir, de leur façon de vivre cette nouvelle vie, m'intéresse pas mal finalement. Puis, force est de constater que ce sujet revient souvent sur la table. Ben oui, comment qu'ça se fait donc que toi spanish, scottish french or japanese people, je te rencontre ici, en Australie ?


Claudio a 28 ans, né en 1984 ( le meilleur cru de ce dernier siècle, il faut reconnaître) à Latisana dans le nord de l'Italie, dans la province d'Udine, il est le fils unique de ses 2 parents, et oui, la surprise est énorme, je comprends.
Papa est chef dans un restaurant 1 étoile au Michelin, spécialisé dans le poisson, à Rivignano.
Juana, alias maman, est mère au foyer et est une française arrivée en Italie à l'âge de 16 ans. 


Autrement dit Claudio est moitié rital par papa, moitié çéfran par maman et totalement bilingue. En revanche à la maison on ne parle que le pâtois, appelé Friulano, donc on apprend l'italien à l'école et le français avec les cousins français qui viennent en Italie en vacances. "Ces vacances j'en ai profité jusqu'à 15 ans, ensuite je travaillais l'été, je ramassais des pommes."

"Côté scolaire, j'ai fait des études assez générales jusqu'à 14 ans (le collège quoi) puis de 14 à 18 ans j'ai étudié le tourisme à Lignano, tout près de la mer, j'étais en Scuola Superiore per il turismo"

"Et pourquoi le tourisme d'ailleurs ?"
Il répond du tac au tac : 
" Pour voyager, pour les langues, j'ai toujours envie de comprendre quand quelqu'un parle, même si c'est une langue différente. 
- Bon ben moi, parfois, j'ai même pas envie de comprendre ce que disent mes collègues francophones....-
En étudiant, j'imaginais voyager, je me voyais pas à un poste, avoir un travail dans l’industrie touristique, je me voyais en voyage. 
Tout ça a commencé à cause d'une japonaise en fait, ma correspondante au collège, on s'écrivait en anglais et un jour elle m'a envoyé mon prénom écrit en Katakana, et là je me souviens de m'être dit : je veux apprendre cette langue. Du coup après mes étude en tourisme, à 19 ans, je suis parti à l'université et j'ai étudié le japon, sa langue, son histoire et sa culture pendant 3 ans."
Petite question, qui me vient tout de suite en entendant cela, "Et ça t'a pas soûlé en 3 ans?"
"Non, pas du tout, il faut beaucoup-beaucoup de temps pour apprendre cette langue, pour nous imprégner de l'Asie en général, nous avons aussi fait du coréen, du  chinois et du mandchou qui est une langue morte."
Yeux écarquillés de respect 
"- Tu te vois vivre en Asie ?
Un OUI très rassuré, 
- sans même réfléchir je peux m'installer.
- Ah ouai ?? Même en Mongolie ??
- Je connais pas mais peut-être, j'aime bien les choses que je ne connais pas."

Après ses études, Claudio est parti vivre à Venise, de 2004 à 2011, il a commencé à travailler dans la rue, il vendait des places de concert, habillé en, je cite "clown de Venise"... ça ne vous dit rien ? Moi non plus, du coup on a une photo pour comprendre !

Ensuite, il a cherché à se faire embaucher dans la restauration, sans succès... C'est comme ça que Claudio a démarré sa carrière dans la réception d'hôtels de luxe. Un peu comme cuisinier, ce travail existe dans tous les pays, sans le savoir il commençait à se professionnaliser dans un métier qui lui permettrait de voyager.

Ses 2 voyages au Japon en 2007 et 2008, de 3 mois à chaque fois, l'ont convaincu qu'il voulait s'installer pour vivre sa vie dans l'archipel nippon. La première fois il part pour approfondir son japonais.Au final, il ne fera pas plus d'un mois de cours. Dans son école il a rencontré un italien, cet homme d'une quarantaine d'années lui a permis de faire son entrée dans la communauté italienne locale. Communauté qui compte beaucoup de japonais passionné par l'Italie. Il a profité de cette occasion pour rencontrer un maximum de japonais et découvrir leur façon de vivre, en sortant des circuits touristiques.
" Et c'est quoi alors pour toi la "vraie vie" de là-bas ? 
- Sortir, voir des copains, faire toujours quelque chose de différent, et c'est très facile à Tokyo. On fait des choses simples : restaurant, parc, karaoké, manger un truc nouveau, connaitre une nouvelle personne, découvrir un nouvel endroit... Oui, on peut le faire partout mais au Japon c'est extrêmement facile. Ils pensent différemment  je peux pas te donner d'exemple concret, j'aimais vivre là-bas, ces 3 mois m'ont changé."

" En 2008 je suis reparti pour chercher un travail.
Sans Visa.
Je voulais m'installer.
Et en fait, c'est là que j'ai rencontré ma copine actuelle. Une italienne.
Elle faisait du volontariat dans le nord du japon et est passé à Tokyo pendant 10 jours, je l'ai guidé pendant 10 jours. Elle était de Vérone. Elle est rentrée 1 mois avant moi et c'est certainement ce qui m'a permis de rentrer en Italie."

" Quand on s'est retrouvé tous les 2, on avait chacun un bon travail qui nous convenait mais l'envie de partir était plus forte.
- Et pourquoi vouloir autant quitter l'Italie ?
- Parce-qu'il n'y a rien à faire là-bas, rien ne bouge, rien ne change. Le salaire moyen est de 1000€ par mois, tu travailles par tranche de 6 mois pour le même employeur, avec 20 jours de vacances entre chaque période de 6 mois. Comme ça tu ne signes pas de CDI et tu restes en CDD toute ta vie. C'est comme ça depuis mes 20 ans. Quand tu cherches un travail, en entretien, tu ne demandes pas le salaire, le temps de travail par semaine ou les avantages. Avoir simplement un travail est une chance énorme en Italie actuellement."

Je lui ai demandé si sa famille savait qu'il voulait absolument partir, il me confirme que pour elle comme pour lui, les parents savaient qu'ils feraient tout pour quitter leur pays. 
"Tous mes amis ingénieurs sont partis"
"Quand tu sais faire quelque chose il faut partir, ça ne vaut pas le coup de rester."
"Sans CDI on n'aura jamais de maison, sans maison, on ne sera jamais en sécurité. Entre ne rien avoir en Italie, et ne rien avoir à l'étranger, au moins en partant tu auras vu le monde, tu seras riche de ça. Par rapport à tous ceux qui ne pourront jamais se payer un billet d'avion."

" C'est en réfléchissant aux lieux dans lesquels on pourrait s'installer que nous est venu l'idée de l'Australie. Décidés en mai 2012, nous sommes partis en septembre de la même année. Je n'attendais rien de particulier en venant ici. Licia ma copine avait un stage, moi je savais que je pourrais trouver du travail dans l'hôtellerie. 2 semaines après notre arrivée j'avais un travail."

"Je me vois bien rester ici, Déjà, il est très facile de voyager un peu partout en Asie. C'est encore possible de se faire une vie tranquille avec une maison, des enfants, des choses simples et normales. Maintenant je sais que je ne reviendrais jamais en Europe. Et si ma vie je ne la construis pas ici, je la construirais au Japon, et si c'est pas le Japon, ça sera le Canada. Partout sauf en Europe."

" On est la génération qui va mourir jeunes, on  passé le moment du "vivre bien", c'était pour nos parents ça : la bonne santé, bien manger, vivre dans un environnement naturel. Nous on est la génération chimique : on mange, on respire, on boit du chimique"...

C'est sur ces mots d'un optimisme ahurissant que notre interview s'est terminée. Le contraste entre sa façon d'être, bon vivant, drôle et cette vision de sa vie m'ont réellement surprise. On a continué ensuite notre soirée, sur un ton moins grave pour le coup !



"Moi, en rappeur français, je connais Doc Gyneco"

2 commentaires:

  1. J'te kiffe ma chérie, il est super cet article. ça me plonge tellement dans ce que je veux, je recherche... Profite ma belette
    Tu m'manques raclure!!
    Love

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  2. Waouuuh, merci bibiche pour ce commentaire d'amûûûûûûrrr !
    ça m'encourage, ça me booste,
    Love you baby :)
    Mouak :-*

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